ABSTRACT-terripture - Analyse des barrières à la mise en place de stratégie d'adaptation aux changements climatiques-­‐territoire en rupture

Porteurs du projet :

• Guillaume Simonet (CDC Climat, chercheur invité au GET UMR5563) guillaume.simonet@get.obs-mip.fr
• Roman Teisserenc (EcoLab, MCF INPT) roman.teisserenc@ensat.fr
• Nicola Gallai (LEREPS, MCF ENFA) nicola.gallai@educagri.fr

Mots clés : Changements climatiques ; Adaptation ; Vulnérabilité ; Représentations Sociales ; Évaluation Économique

Contexte global

Les changements climatiques sont très largement décrits et observés et la contribution humaine à ces changements ne fait plus de doute (IPCC, 2013). A cette tendance climatique s’ajoutent les fortes pressions anthropiques exercées sur les ressources et milieux naturels. Ces pressions conditionnent le bien-être social des populations, les activités économiques, le fonctionnement optimal des écosystèmes et de la biodiversité y évoluant. Dans un tel contexte imbriqué d’évolutions multiples à l’échelle aussi bien globale que locale, il demeure désormais inéluctable d’ajuster les systèmes en vue de réduire l’ampleur des impacts actuels et d’anticiper ceux à venir (Füssel, 2007). Les territoires montagnards constituent des territoires frontières qui expérimentent les changements climatiques en premier lieu. Le stockage d’eau, naturellement porté par la couverture du manteau neigeux Pyrénéen, est amené à se réduire (Lopez-Moreno, 2005) et les constructions artificielles de retenues d’eau font face à une vive opposition, le rejet du projet Charlas en 2003 faisant office d’exemple. Au niveau de la vallée de Vicdessos, la perte progressive de la ressource neigeuse est une donnée à prendre en compte pour l’économie locale (tourisme, production d’hydroélectricité, biodiversité, agropastoralisme). Confirmé par les outils prospectifs, les impacts des changements climatiques, en cours et à venir, sont à l’origine d’une dynamique « silencieuse » des populations, des activités et des milieux naturels visant à s’adapter aux nouvelles réalités climatiques locales.

Objectifs

L’objectif principal du projet ABSTRACT-terripture réside en premier lieu dans l’identification des « adaptations silencieuses » en cours face aux nouvelles réalités climatiques locales et dans l’identification des obstacles et des opportunités existants au sein des mécanismes sociaux, économiques, institutionnels et organisationnels mobilisés pour l’élaboration, la mise en place et l’intégration de réponses aux changements climatiques en prenant la vallée de Vicdessos comme cadre d’étude géographique. Dans ce contexte, l’étude canalisera son attention sur la gestion des ressources naturelles et des opportunités économiques nouvelles. Par le biais d’une démarche de co-construction de connaissances avec des acteurs locaux ciblés, le projet entend stimuler l’émergence de réflexions et d’approches de travail pouvant accompagner l’élaboration de cadres opératoires réajustés ou originaux qui intègrent des processus et des actions réduisant la vulnérabilité du territoire montagnard, de ses populations et de ses activités face aux nouvelles réalités climatiques dans un contexte de changement global, en interrogeant notamment les dynamiques et les capacités d’adaptation du territoire.

Sous-Objectifs :

T1-Étude des barrières cognitives
Cette tâche se situe à l’échelle de l’individu et vise à comparer les perceptions du risque climatique émanant des acteurs interrogés et les risques « réels » envisagés par les connaissances scientifiques (incluant les incertitudes). L’étude du décalage entre ces deux dimensions permet de réfléchir sur la manière dont les acteurs du territoire peuvent être impliqués dans des démarches de participation à la définition d’objectifs et/ou d’actions collectives (Le Floch, 2011). Cet aspect est important dans un contexte où ce public s’impose comme un acteur incontournable dans les régulations de l’action publique (Charles et Kalaora, 2003). L’analyse des représentations sociales permet également d’établir les cadres cognitifs qui structurent la perception des changements climatiques et de déceler ceux faisant obstacles à l’action (Agrawala et van Aalst, 2005). Les outils sociologiques utilisés permettent de mettre en valeur les dimensions cognitives et sociales qui freinent, par le biais de prises de position, d’attitudes ou de comportements, l’efficacité ou le développement de stratégies d’adaptation aux changements climatiques. Ils permettent également d’en mesurer l’influence sur les dynamiques organisationnelles locales, sur la propension à engendrer des points de tension ou de coopération, ainsi que sur la capacité à mettre en place des cadres opératoires prenant en compte les nouvelles réalités climatiques dans la vie territoriale et communautaire. Il s’agit de saisir le principe organisateur (attitude, norme) coordonnant les représentations sociales (valeurs, opinions) qui permettent d’orienter et de justifier les conduites et les rapports sociaux, d’interpréter la réalité quotidienne et de comprendre les phénomènes nouveaux. Les outils et réflexions portant sur l’analyse du discours, les représentations sociales (Moscovici, 1984 ; Depeau, 2006) et quelques notions de psychologie cognitive (Terrasson, 1997) seront mobilisés dans cette tâche.

T2-Analyse qualitative et quantitative des perceptions et croyances individuelles
Cette deuxième tâche, menée conjointement avec la première, vise à identifier les systèmes de croyances des acteurs et des usagers locaux. Premièrement il sera important de comprendre les raisons qui conduisent les différentes catégories d’acteurs à interagir de telle ou telle façon avec l’écosystème montagnard qui caractérise la Vallée de Vicdessos : quelles raisons justifient que certains services écosystémiques entrent dans leur fonction « profit » ou « utilité » et pas d’autres ?  Pourquoi, selon les acteurs, cette interaction engendre-t-elle un ressenti positif ou négatif, voire une combinaison des deux suivant les services offerts ? L’ambition de cette tâche est d’approfondir l’analyse des croyances individuelles et d’évaluer leur influence sur les préférences et la rationalité des acteurs. La prise en compte du système de croyances doit servir : 1) à comprendre le comportement des acteurs face à l’écosystème de la Vallée de Vicdessos, 2) à prédire leurs actions face aux impacts des changements climatiques et leurs stratégies d’adaptation et 3) à éclairer les choix de politique publique locale et régionale en terme de gestion des ressources et aider en cela à renforcer l’efficacité et l’efficience des mesures incitatives et règlementaires mises en œuvre pour protéger l’écosystème montagnard. L’évaluation économique est au cœur de cette tâche qui focalise l’attention sur la valeur que confère un groupe (et non un individu) aux services écosystémiques et les implications que cela entraine dans les décisions politiques locales.

Résultats escomptés

Méthodologie proposée

Au niveau méthodologique, le projet opte pour le croisement de méthodes sociologiques (analyse quantitative et qualitative des représentations sociales) et économiques (méthode d’évaluation monétaire délibérative).

Enquêtes sociologiques multivariées :
Le projet ABSTRACT-terripture s’appuie principalement sur des enquêtes sociologiques auprès d’un certain nombre de groupes d’acteurs du territoire au préalablement ciblés. Les outils sociologiques mobilisés lors de cette étape sont multiples afin de recueillir un maximum d’informations.

Entretiens semi-dirigés (anonymes, individuels et en face-à-face).
À partir d’un guide d’entretien soigneusement élaboré et testé, des entretiens semi-dirigés seront menés auprès de groupes d’acteurs choisis parmi les secteurs professionnels (communautaires, privé, public) en jeu et selon les disponibilités du moment. Ces entretiens répétés permettront de dégager les tendances sur lesquels les choix d’acteurs à aller interroger seront définis dans une démarche progressive et inductive. Le nombre minimal d’entretiens sera défini en fonction de la durée de l’étude (20 pour une recherche d’une durée d’un an est souvent recommandée).

Focus Groupes (FG).
La création de FG auprès de groupes d’acteurs sélectionnés de manière plus précise sera utilisée pour recueillir de plus amples informations et pour préciser les réflexions entamées lors des entretiens semi-dirigés et dégagées dans les questionnaires. Ces groupes seront de 6-8 personnes représentatives du milieu local.